Apprendre à coudre : le défi

J’ai décidé aujourd’hui de te parler de cet immense défi intellectuel qu’a été la découverte de la couture et des peurs paniques que ça déclenche encore parfois chez moi. Tu trouves que j’exagère et que j’en rajoute ? Non même pas… Depuis quelques temps et encore plus depuis que j’ai  réalisé La Parisienne, je me suis aperçue que quelque chose avait changé quant à ma perception de la couture même si tout n’est pas réglé.

Si aujourd’hui, je me surprends à commenter à haute-voix, comme une vieille folle, les choix techniques ou de matière des candidats de Cousu Main, sache que je suis passée par des phases d’approximation totale. Alors couturière débutante, fais confiance à la pas-débutante-mais-pas-très-forte-non-plus couturière que je suis : tout ça finira par passer, ou pas. Tour d’horizon des petits murets et grande muraille (de Chine) que doit franchir la couturière amatrice, inspirés de faits réels et pas si lointains.

1 /Quand tu veux commencer à coudre 

  • Choisir sa machine à coudre, acheter du fil et des aiguilles aussi. Parce que tu vas en casser des aiguilles, ma cocotte !
  • Et puis des ciseaux, tiens.
  • Là, ta mère te dit qu’il te faut une craie de tailleur, gné ?!
  • Tu te jettes dans la mercerie du coin pour acheter du tissu et tu te fais gronder par une vielle peau aigrie parce que tu sais pas ce que tu veux, que tu sais pas pourquoi c’est faire et que tu as tout doucement balbutié  « heu.. le moins cher ».
  • Solution de repli chez Ikea* où tu choisis des jolis tissus bien épais, avec des grosses fleurs ou celui qui est par terre en promo, tu le coupes toute seule (pas droit), t’es contente.

2/ Quand tu vas effectivement coudre pour la première fois 

  • Une demi-journée perdue juste à regarder la machine à coudre dans la boîte
  • Deuxième demie-journée à étudier le mode d’emploi de la machine, à fabriquer ta canette, à enfiler le fil, à essayer de comprendre pourquoi y a besoin de deux fils, bordel…
  • Tu prends un vieux torchon et tu… piques tout droit. Et ça casse. En tremblant, tu recommences et … ça casse. T’appelle ta mère qui voit pas comment tu te débrouilles pour faire ça.
  • Quand tu demandes à une couturière avertie, elle te demande si tu as réglé la tension du fil, tu vois pas ce que ça veut dire et tu jures que tu n’as rien touché.

 

3/Quand tu vas essayer de suivre un tuto ou un patron pour la première fois 

  • Le tissu n’est pas lavé et pas repassé, mais on s’en fout.
  • T’as pas la Vliseline (la quoi ?), le biais de 4 cm et l’élastique blanc de 2 m, mais on s’en fout
  • Les pièces du patron sont coupées. Le papier de soie t’a donné du fil à retordre, le chat en a bouffé un morceau. Rien n’est droit, mais on s’en fout.
  • Tu commences la couture : endroit contre endroit, ouvrir la couture. Mais pourquoi faut ouvrir la couture que tu viens juste de faire, hein ?
  • Et tu réalises que si, ça se voit finalement que t’as pas coupé droit.
  • Et tu réalises que si, ça se voit finalement que le fil de cannette n’est pas de la bonne couleur
  • Et tu réalises que non, le tissu d’ameublement Ikea ne tombe pas très bien en blouse
  • Et tu réalises que finalement, t’aurais peut-être dû le sortir le fer à repasser
  • Et tu réalises que t’as tellement bouffé les marges de coutures (les quoi ?) que tu n’y rentres plus dans ta blouse enfin si, tu rentres, sauf le sein gauche…

4/Quand tu vas retoucher à ta machine après des mois d’abandon

  • Je t’invite à relire les points 2 et 3…Tu découvres le découd-vite et tu trouves ça plutôt long.
  • Et finalement, c’est pas si mal, même, si c’est pas cousu droit, même si la fermeture forme un bec bizarre… même si le tissu ne tombe pas très bien (putain de tissus Ikea !). T’as cassé que 2 aiguilles cette fois, victoire !

5/ Quand tu as enfin compris que la couture c’est un art avec des règles, des étapes à respecter et des techniques à apprendre

  • Tu sais que les tutos Youtube sont tes amis
  • Tu potasses tes bouquins techniques quand tu as un doute
  • Tu as définitivement abandonné le papier de soie au profit du plastique pour recouvrir les livres pour reporter tes patrons.
  • Tu mets des plombes à préparer ta couture : décatir le tissu, le repasser, le plier parfaitement, reporter les pièces du patron.
  • Tu fais même des toiles pour tester la coupe et bien tout comprendre avant de coudre la pièce finale.
  • Du rêve de prendre des cours pour combler tes lacunes et enfin comprendre les subtilités de ta surjeteuse.
  • Tu regardes ton armoire à tissus et tu réalises que les achats compulsifs de tes débuts vont être difficiles à écouler (putain de tissus Ikea).
  • Tu regardes tes premiers projets, tu relis tes premiers articles de blog, avec un mélange d’émotions et de franche pitié.
  • Tu te surprends à dire à tes collègues « oh, ça tu peux le coudre toi-même au lieu de l’acheter, ça prend 5 minutes ». Menteuse, va !

6/ Quand tu peux enfin arborer un vêtement que tu as cousu toi-même

  • T’es fière quand on te demande si c’est toi qui l’as fait
  • T’es vexée quand on te demande si c’est toi qui l’as fait.
  • Tu trembles à l’idée que ça casse, que ça lâche et que ça retombe en pièce, façon 2CV.

Et  donc ?

Pour écrire cet article, j’ai relu mes premiers articles couture publiés ici même, il y a 5 ans. Incroyable, je ne comprenais rien de rien ! Ah le jargon de la couturière, surfiler et son cousin faufiler, cranter, retourner, placer l’enforme, placer le zip en portefeuille… autant de vocabulaire à apprendre que d’actions à savoir faire. C’est un apprentissage et c’est pas simple du tout.

J’ai eu beaucoup de mal avec la projection en 3 dimensions : passer de morceaux de tissus planes à une forme en volume. Appréhender ces histoires d’endroit et d’envers (je me foire encore régulièrement sur le sens de pose des fermetures mais maintenant j’épingle avant de coudre, héhéhé).

J’en ai beaucoup voulu aux explications elliptiques ou induites, surtout pour des revues, livres, modèles qui se disaient pour débutant. Je hais les schémas que je ne comprends jamais, je suis une fille de Lettres moi, il me faut des mots et pas des mots inventés par Burda, merci.

Aujourd’hui, je prends enfin plaisir à coudre, j’ai moins peur (sauf de cette histoire de 2CV…) mais quel parcours du combattant ! Toi aussi, t’en a bavé avec la couture ou une autre technique ? ça t’arrive de ne pas avoire confiance dans tes coutures ? D’avoir peur que ça lâche ? Dis-moi que je ne suis pas seule, je t’en prie !

En ce moment, je regarde Cousu Main (bien-sûr) et si tu écoutes Julien Scavini et la voix off, ils disent qu’à moindre coût et très facilement, on peut réaliser chez soi des vêtements semblables à ceux du commerce, je crois même qu’ils rajoutent « en peu de temps » ou un truc comme ça. Sans blague.

Si t’es sage, je te raconterai les canyons que j’ai dû traverser au tricot et les rapides que j’ai descendus avant de réussir à crocheter…

*NB : je les trouve beaux hein les tissus Ikea et j’en ai plein d’ailleurs (!), c’est juste qu’ils se prêtent plus à la réalisation de coussins que de robes de soirées et ça PERSONNE NE TE LE DIS JAMAIS !
Sources des gifs : Giphy.com